Je vais te dire un truc : s’il y a une saison que je
n’aime pas, c’est bien l’automne.
Je trouve que l’été est la saison la plus sympa. Chaque
week-end est rythmé par de nouveaux départs et de nouveaux retours ; c’est
une vaste transhumance. Du coup, tout n’est que prétexte à longs apéritifs et
dîners en terrasses, échanges d’impressions sur les endroits où l’on a passé
nos vacances, forcément « magiques » et « délicieuses », où
chacun a vécu « une vraie expérience, tu vois ». Tout le monde est
beau, bronzé, en forme et détendu. Les garçons remontent les manches de leurs
chemises et dévoilent des avant-bras puissants et bronzés. Tu te dis que la vie
est belle.
Et puis septembre arrive. Les soirées sont encore belles. On
fait semblant de croire que l‘été ne va pas se terminer et on se laisse aller à
fredonner du Jo Dassin. Quand j’étais petite fille, j’aimais bien reprendre l’école,
retrouver les copines et « apprendre de nouvelles choses ».
Maintenant, c’est Top Resa qui sonne le renouveau de l’année. Et j’aime bien…
Mais inexorablement, arrive l’automne. Chaque matin, tu te
dis que le froid pique un peu plus. Tu te couvres. Un jour, écervelée et
confiante en la vie, comme il y a un semblant de redoux, tu relâches un peu la
pression et tu t’habilles un peu plus légèrement. Et là, c’est le
drame : sournois, le mal arrive et s’agrippe à toi. Tu chopes ce que ma
grand-mère appelle un « coup de froid ». Tu n’es que remugles et
crachats pendant deux semaines. Tu as l’impression que ta tête va exploser, tu
as froid aux pieds alors que tu as pris soin de glisser dans tes bottes une
petite semelle en peau de mouton.
D’ailleurs, c’est la seule bonne nouvelle de
l’automne : on peut ressortir ses bottes, voire en acheter une nouvelle
paire, ou plusieurs…
(note aux lecteurs : jamais je ne pourrai sortir de
l’anonymat : je ne pourrai pas assumer t’avoir dit que je porte des
semelles en peau de mouton)
Le coup de grâce arrive, mauvais, le dernier week-end du
mois d’octobre : le changement d’heure. Depuis plusieurs semaines, tu
remarquais que même en sortant de l’agence à l’heure, il faisait bien sombre.
Mais au moment du changement d’heure, il fait nuit noire bien avant que l’heure
de partir n’arrive. Le choc.
Et cette petite fièvre qui ne passe pas… et la goutte au nez qui n’en finit pas de
couler…
Au bout de quinze jours, je suis allée faire écouter ma toux
à mon médecin-traitant. « ça m’est tombé sur les bronches, docteur (...) et puis par dessus le marché, je suis crevée, démoralisée,
ramollie, comme chaque année au mois de novembre, en fait ». Doc m’a
répondu que j’étais normale : je souffrirais de « dépression
saisonnière »
Je t’explique : la science ne comprend pas bien comment
le truc marche mais si on est nombreux à avoir ce petit coup de mou en automne,
ça serait à cause du manque de lumière : il entraînerait une variation de
la production de la mélatonine et de l’activité reliée à la sérotonime. Si tu
veux en savoir davantage, file sur le web et cherche des articles de
vulgarisation scientifique. Ça ne rentre pas dans la ligné édito de mon blog mais tu vas te rendre compte que non, tu n’es pas la seule à devenir toute moisie en cette saison…
Cet automne, ce qui est pire que tout pour moi, c’est que
Coralie est en congé mat’ et que du coup, je n’ai pas eu un week-end tranquille
depuis deux mois : bosser 6 jours par semaine depuis la rentrée, c’est
bien gentil mais là, mon corps crie « au secours ! ». La
perspective d’être en vacances-récup tout le mois de mars n’est pas suffisante
pour me maintenir la tête hors de l‘eau.
Mardi dernier (enfin, mardi en 8, mais dans l'autre sens...), je rentrais chez moi en pédalant comme une folle après une longue
journée à l’agence. Il était genre 21h. J’étais survoltée à cause de cette
salope de Sandy (celle qui nous empêche de vendre NYC aux vacances de la
Toussaint avec sérénité). Mon Vélib a glissé sur un tas de feuilles mortes et
je me suis étalée de tout mon long. Outre que c’est humiliant à souhait, ça a
été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase : je suis rentrée chez moi
en boitillant, j’ai appelé Big-Boss en larmes pour lui dire que j’étais au bout
du rouleau et que je ne viendrai pas le lendemain. Je suis restée au fond de
mon lit toute la journée.
Au programme, citron chaud, masques hydratants et
bain moussant. Histoire de reprendre des forces. C’est comme ça que je me suis
retrouvée jeudi (jour férié) tout l’après-midi à l’agence à faire ce que je
n’avais pas fait la veille.
Bon, je te raconte ma life mais il se passe des trucs plus
graves dans notre environnement professionnel. C’est l’automne, certes… mais
selon l‘avis de certains, on en arriverait à l’automne de notre vie. Et encore,
apprécie que je n’aie pas surfé sur la métaphore du jour des morts.
Revue de bonnes nouvelles : les TO s’attendent à une
baisse de leur chiffre cet hiver de 8 à 10% et Saint Georges (pas celui qui a
tué le dragon d’un coup d’épée : notre père à tous, celui du SNAV…) a
déclaré il y a 15 jours que la profession avait encore tué 1000 emplois cette
année. Le SNAV a aussi publié une étude qui dit que la profession est passée de
33 236 salariés en 2007 à 27 464 en 2010. Ça fait quand même 17% des
effectifs.
Où ai-je rangé ma corde ?
Pour s’en sortir, quelles sont les solutions ? Nombreux
sont ceux qui semblent se dire que la consolidation/concentration est la bonne
solution. Mouais… j’ai déjà écrit ici que je ne voyais pas l’intérêt des
fusions. Je te donne quelques exemples. Je ne mets pas toutes ces fusions dans
le même panier mais dans chacune d’elles, j’entends comme un truc genre
« au secours ».
On a vu la fusion Go-Opodo-E Dreams. 3 technologies
différentes à la base, mais les 3 marques vont se mettre à la technologie
e-dreams, très aboutie pour « chercher » mais qui, à force de forcer
et bidouiller, arrive à trouver des catastrophes. L’effet volume est là. Les
compagnies tremblent mais la plus belle fille du monde ne peut donner que ce
qu’elle a. Et les compagnies n’ont de toute façon plus un centime pour payer
des rétro-com’. Bravofly vient de racheter Rumbo. Quand tout le monde aura
racheté tout le monde et que plus personne ne pourra grossir, on sera arrivé à
une espèce de monopole. Mais bon, c’est pas sur le vol sec qu’on va essayer de gagner
de l’argent.
Il y a eu NF-TUI-Aventuria-Tourinter-Marmara-Havas-Carlson.
Cette fusion est la preuve que dans le cas de fusions-acquisitions, 1+1+1 ne
fait jamais 3 et encore moins 4. Je m’explique : une fois les différentes
entreprises regroupées, harmonisées puis réunies, que se passe-t-il ? On
coupe !
Le meilleur exemple, c’est que NF abandonne les clubs pour laisser
la place à Marmara. Où est l’effet de masse dans ce cas ? Les clients qui
achetaient du Paladien vont-ils tous acheter du Club Marmara à la place ?
je suis sure que les clubs de FRAM et autres Lookea récupèreront une partie du
marché. Ça, c’était l’exemple de la production. Et pour la partie
distribution ?
Depuis que les Carlson sont devenues Havas, on trouve 2
points de vente concurrents dans le même quartier dans bien des villes de
France. Le consommateur ne comprend plus rien ? Pas grave, on s’en fout,
on occupe le marché ! mais bon… au bout d’un moment, quand 2 points de
vente de la même marques cohabitent à 100 mètres l’un de l’autre, il y en a
toujours un qui ferme.
L’acquisition que je trouve la plus pertinente, c’est celle
de Marietton qui tisse sa toile dans tout le quart sud-est de la France.
Excusez-moi du peu mais la holding a désormais 83 agences, des charters au
départ de Lyon et Marseille (et même de l’aéroport de Saint Etienne)
Tiens, à propos… je tiens à partager avec toi cette
information de toute première importance : le code de l’aéroport de Saint
Etienne, c’est EBU. Certes, comme tout le monde, tu t’en fous mais connaître le
code de l’aéroport de Saint Etienne va te permettre d’avoir un regard neuf sur
cette ville. Que sait-on de Saint Etienne ? (à part qu’un jour, elle a eu
une équipe de foot). Ben rien. Essaie de dire quelques chose d’intelligent sur
Saint Etienne. Voilà. Tu es creux !
En tout cas, les produits packagés d’Ailleurs et Voyamar
vont pouvoir bénéficier de la force de vente de toutes agences du groupe, aux
couleurs variées de Selectour, AFAT ou Carrefour. Des agences qui vont bien
entendu avoir des directives de vente précises : il faut bien écouler les
sièges et les chambres à risque du groupe. C’est le chiffre de FRAM et de LOOK
qui va baisser !
FRAM et Look qui vont du coup avoir besoin de
« sécuriser leur distribution » en rachetant des points de vente
un peu partout. La bonne nouvelle, c’est
que si les mouvements de concentration continuent, on va finir par ne plus voir
exactement la même chose dans chaque agence…
Mais comme il n’y a plus de client, personne ne va s’en
émouvoir.
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