mardi 17 septembre 2013

Léa n'ira pas à l'IFTM mais elle va faire un break au soleil

La semaine prochaine, c’est l’IFTM et je n’y mettrai pas les pieds. Voilà. C’est dit. A l’IFTM, on ne travaille pas. En ce moment, je n’arrive pas à trouver le temps de tout faire alors je dois définir mes priorités. Mes priorités, c’est vivre ma life (je vais vous raconter les derniers changements) et faire du chiffre à l’agence. Les bisous à la Porte de Versailles, joker pour cette année.  



Big-Boss va y aller mardi « pour sentir l’ambiance », Cette grosse pouf' d'Elisabeth y va pour « claquer une bise aux poulettes des TO » et le reste du personnel de l’agence n’ira pas Porte de Versailles. Il y a encore un an ou deux, j’aurais dit que c’était une faute professionnelle. Mais j’ai changé d’avis. (mon côté girouette, sans doute)

En plus, de jeudi à dimanche, Big-Boss emmène ses 3 drôles de dames (C’est ainsi qu’il nous appelle, désormais, Isa, Sonia et moi) en « meeting off-site ». C’est un truc assez strange où on s’enferme pour parler boutique de la stratégie de l’agence.

Selon l’humeur et les finannces de Big-Boss, on fait ça dans une arrière-salle de bistrot à côté de l’agence, dans une salle de réunion d’une espèce d’hôtel prétentieux à Pernety (c’est à l’autre bout de Paris, j’ai dit que je ne voulais plus y mettre les pieds) ou dans la bicoque bobo jolie maison de Big-Boss à l’île de Ré.

Mais là, je pense que Big-Boss compte faire les choses en grand puisqu’il nous a demandé de lui confier nos passeports. On ne sait pas où on va mais on part jeudi à 14h de l’agence et on rentre dimanche soir. Big-Boss a parfois un humour douteux et je lui ai demandé s’il avait vraiment besoin de nos passeports. Parce que si c’est pour nous dire qu’on va à Pithiviers et que Pithiviers, c’est le trou du cul bout du monde, c’est pas drôle.

Pour me rassurer, il m’a promis qu’il ferait beau là où on serait. Du coup, il m’intrigue et je trouve ce suspens insoutenable. J’espère qu’on ira à Istanbul. J’ai très envie d’Istanbul… En tout cas, la semaine à l’agence va être courte.

Bref, cette année, pas de sourires faux-cul bisous aux commerciaux et aux confrères, pas de speed-datings avec les TO, pas de remarques médisantes sur les tenues corporate des exposants… rien.
Mais mon Nico expose. Il a 2 m² dans un coin de stand pour parler avec amour de ses petits hôtels. C’est sûr que j’aurai du gossip à la maison mardi et mercredi soir.

Et là, mes lecteurs fidèles froncent le sourcil : Léa a écrit « à la maison » et pas « à la coloc’ des princesses ». Ben oui : figurez-vous qu’avec Nico, on a décidé de faire le grand saut. C’est qu’à nous deux, ça nous fait 60 ans (pas répartis très équitablement mais c’est un détail) et qu’on a décidé qu’on pouvait franchir un nouveau pas et s’installer. On a trouvé une merveille derrière la gare du nord. C’est un peu sale comme quartier mais c’est pas cher. Du coup, on a pris grand et joli.

Les mauvaises langues diront que notre appart est une espèce de grand studio. Moi, je préfère dire que c’est un petit loft. Je vous raconte ? On a une grande salle de bains, un petit dressing et une « pièce à vivre » de 52 m² qui fait salon, salle à manger, cuisine, chambre, bibliothèque et salle télé. Il y a 4 fenêtres et on a fait une déco un peu folle. Le gros de la déco, c’est la collection de robots de Nico et toutes mes Barbie de petite fille, qu’un soir de mojito-party, ma copine Barbara (qui est petite main dans une maison de couture) a recostumisées façon trash.

On a plein d’Indiens juste à côté. Odeurs d’épices et d’encens, couleurs chatoyantes… j’ai l’impression d’être en vacances tous les jours depuis notre emménagement. Du coup, j’ai l’harmonie de Ganesh dans mon esprit et les chakras bien ouverts.

Et le grand intérêt de vivre tous les deux sans les copines, c’est que Nico peut se balader à poil sans provoquer de syncope chez mes ex-coloc. Plaisir des yeux, vraiment. J’ai beau le regarder sur tous les angles depuis 18 mois, je ne me lasse pas du spectacle. Mais je m’égare : on parlait de l’IFTM, non ?

A l’IFTM, ça va grave intriguer. La santé financière des TO, les accords commerciaux, le mercato des dirigeants des gros groupes, les annonces auxquelles on s’attend tous (on parie que le stand Donatello sera pris d’assaut par les gens qui voudront saluer René et Sébastien ?)… le Landerneau de la profession va se regarder le nombril. Que des trucs qui ne vont pas nous changer la vie à nous, les petites vendeuses blondes des comptoirs.

Moi, ce qui me change la vie, en cette rentrée, c’est que… 
- j’ai quitté cet espèce de kibboutz qu’était la coloc des princesses pour me retrouver dans un petit cocon avec mon amoureux,
- si je veux aller travailler à pied, je mets deux fois plus longtemps qu’avant (du coup, j’y vais à velib),
- je suis effarée de la peopolisation de notre profession qui semble s’intéresser davantage à ceux qui font et défont la politique qu’au comportement de nos clients,
- que j’ai vu un film formidable. Ça s’appelle « Jeune et Jolie » et ça raconte l’histoire d’une fille qui s’appelle Isabelle et qui se fait appeler Léa pour mener une double vie (ça ne vous rappelle rien ?). Ça n’a rien à voir avec la profession mais c’est une formidable analyse des rapports entre les gens : frère et sœur, parents et enfants, hommes et femmes, puissants et faibles. Il faut voir ce film.


En fait, pour moi qui aime filer la métaphore tour-operatoresque, ma vie, depuis que je vivais en coloc, c’était celle d’Austral-Lagons : j’existais mais j’étais juste une espèce de petite bulle, entraînée dans la mouvance de la coloc : je suivais le mouvement. (la différence, c’est que ma coloc m’entrainait dans un mouvement positif). 

Là, j’ai l’impression de devenir adulte et indépendante, de mener ma barque et de décider seule de mon destin. Mais on ne peut pas grandir quand on est seul(e). Nico et moi avons eu le temps de nous observer et de savoir que nous nous aimons. Nous marchons dans la même direction, main dans la main, pour que notre avenir soit beau. Si à l’IFTM, vous pouviez vous demander comment la profession pouvait faire pareil, ça me ferait plaisir.



lundi 2 septembre 2013

Marmara : "TUI m'a tuer"

J’ai une bonne nouvelle pour FRAM : bientôt, les agences de voyages qui vendent du mainstream vont manger dans la main de notre tour opérateur bleu-blanc-rouge préféré.
On ne va pas se mentir : TUI est en train de tuer Marmara.

Les chiffres du groupe TUI sont publiés. Réjouissons-nous : la perte nette sur les 9 premiers mois de l’exercice (oct 2012/sept 2013) baisse à 236 millions de livres contre 284 millions l’an dernier à la même époque. Euh… vraiment ? Vous trouvez qu’il y a de quoi se réjouir ? 

L’autre jour, dans le métro (je vous jure que c’est vrai), j’étais assise à côté d’un monsieur qui visiblement, travaillait chez TUI. Il lisait des papiers pas réjouissants et y’avait écrit « moins » à peu près dans toutes les colonnes… j’ai louché comme une folle sur ses documents mais c’est pas facile de lire les petites lignes en restant discrète. Quand il est sorti du métro, j’ai regardé si par hasard, il ne jetait pas les papiers dans une poubelle. J ‘étais prête à bondir. Mais non, ça aurait été trop beau. Il les a remis dans sa sacoche.

Marmara, ça eut marché, mais ça marche plus. Le long-courrier est un échec cuisant et l’Egypte, le Maroc et la Tunisie, euh… comment te dire ? Alors oui… à fin juin, les réservations pour l’été ont baissé de 22%, ce qui s’explique largement par la baisse de 19% des capacités offertes.

Tellement de baisse de capacité que « des départs prévus en dimanche/dimanche finissent en jeudi/jeudi […] va-t’en expliquer ça au client à un mois de son départ » témoignent plusieurs agences...

Le respect du client, c’est aussi de savoir gérer les capacités pour ne pas dire à des pax qui arrivent à Rhodes que « Vous allez être relogés dans un hôtel 5*, beaucoup mieux de notre club ». Comme ça, tes clients qui avaient réservé un Club Marmara all inclusive, 100% francophone, dans un cadre verdoyant, avec plusieurs restos et piscines, des petites criques pour se baigner se retrouvent dans un hôtel 5* en centre-ville, en pension complète hors boissons, dans un environnement bétonné, avec une seule piscine, très peu de clients français, pas d’activités sportives et avec une plage publique dégueu.


Une autre anecdote ? Un dossier de 2 adultes et de leurs jumeaux de 5 ans à Majorque. Réservation en chambre quadruple faite depuis 6 mois. Marmara t'envoie un mail un mois avant le départ pour t'annoncer que la chambre quadruple n'était plus dispo. On te propose alors deux chambres doubles communicantes. Pas contente de ne plus avoir la quadruple promise et réservée ferme, tu appelles la résa : « euh, comment peux-tu me faire des chambres communicantes en bungalow ? »
- re contre-proposition de Marmara : deux chambres doubles, sans garantie de chambres côte à côte.
- tu sais ce que c’est qu’un enfant de 5 ans ? Tu crois qu’il peut s’assumer tout seul (avec son jumeau quand même…) quand ses parents sont à l’autre bout de l’hôtel ?
- mais chez Marmara, on a réponse à tout : « on va mettre un adulte et un enfant par chambre ». 
A la fin, tu changes tes clients d’hôtel pour éviter l’après-vente.

Forcément, entre les problèmes récurrents et les politiques commerciales pro vente-directe, le réseau de distribution classique tourne désormais carrément le dos à Marmara.

Comment en sommes-nous arrivés là ?

Résumé des épisodes précédents : plan de vol ambitieux, nombreux départs de province, hôtellerie normée, prix canon. Il est clair que produit Marmara se vend facilement, sans besoin de faire beaucoup d’efforts… tout se fait en 3 clics sur un B2B efficace et puissant. Tu édites tes factures, tes vouchers et tes convocations charter. Franchement, pour vendre du mainstream à 399 € la semaine en all inclusive, on ne demande pas mieux.

Et puis un jour, c’est le printemps arabe, TUI décide de fusionner la prod mainstream que la marque soit NF ou Marmara, et c’est le drame. Marmara a beau essayer de positionner des vols vers la Sardaigne, l’Andalousie et la Grèce (et vers les Canaries l’hiver prochain), il faut remplir ces hôtels-clubs. Le tourisme intégré, c’est bien joli en période de rareté de l’offre mais pas quand la demande faiblit…

Les têtes pensantes de Marmara vont nous dire : « c’est la faute des agences. Elles sont frileuses. Elles ne veulent pas vendre les destinations du Maghreb, alors que sur le web, ça marche ». 

Alors voilà : la solution, c’est de se passer des agences de voyages. Pour ça, Marmara a fait le maximum pour détourner les clients des agences. C’est vrai qu’à coup d’affiliation, de présence sur les comparateurs, de campagnes de pub, Marmara peut créer du trafic sur son site web. 

Du coup, pour « acquérir cette clientèle » Marmara l’appâte avec 5% à 10% de réduction sur son site de vente directe. Quand tu sais qu’en agence, on gagne 13 ou 14% sur Marmara, mais seulement 10% sur les promo, rien sur les taxes et qu’une YQ non commissionnée peut représenter 30% du prix du package… tu ne peux pas t’aligner !

A la décharge de Marmara, on (les agences) coûte cher en commission à Marmara. Si Marmara ne veut plus nous rémunérer pour service rendu, que le TO l’assume : dans ce cas, que le prix brochure baisse de 10% et que Marmara prenne des fees aussi ridicule qu’Air France sur son site de vente directe. ça serait le début des « prix net » sur le package, un peu comme ce que nous ont inventé les compagnies aériennes américaines sur les vols il y a une quinzaine d’années. Avec le recul, on ne s’en porte pas plus mal…

Bon. René Thibaut, directeur commercial et Sébastien Boucher, directeur marketing, des anciens de Marmara quittent le navire TUI le mois prochain. Tonton Dom laissait entendre dans son édito de lundi (daté de dimanche : TourMaG, c’est comme Le Monde,  mais à l’envers…), tout ce petit monde devrait finir chez Donatello (il faudrait penser à l’occasion à redimensionner les équipes de résa, mais je m’égare…)

Isabelle Ménard Lepeu, la responsable online et grande distribution quitte aussi l’entreprise, ce qui laisse présager que mêmes les grosses usines de vente de voyages dégriffés en promo de dernière minute ne sont plus en odeur de sainteté chez TUI : maintenant, la distribution, c’est le web Marmara et les agences « maison » aux couleurs de Marmara ou de NF.

Respire et lis ces chiffres : au sein du groupe TUI, pour la période avril/juin, les ventes directes représentent 91% du CA en Grande-Bretagne (dont 47% on line) et 88% du CA en Scandinavie (dont 69% on line).

Je n’ai pas trouvé les chiffres de ce que représente la vente directe chez TUI pour le marché français mais je suis à peu près certaine que le management répondrait « pas assez ». 

Est-ce très efficace ? Je n’en suis pas certaine. Depuis sa reprise par TUI, NF a toujours perdu de l’argent et l’autre jour, l’une de mes amies Facebook disait « j'ai passé un entretien pour un poste dans une agence Marmara. On m’explique très sérieusement qu’ici, quand un client rentre, le but c'est de prendre le plus d'argent possible dans son portefeuille... » Avec du talent, un vendeur peut sans doute faire ça une fois. Mais pour fidéliser, c’est peut-être pas l’idéal. Non ?

Pour résumer le truc, je crois qu’on peut dire que là, la distribution classique et Marmara sont carrément en procédure de divorce. Chez Big-Boss Voyages, on ne vend plus Jet Tours depuis des années, on est en baisse de 70% sur Marmara. Mais c’est un choix : « chez Big Boss Voyages, messieurs-dames, on propose des voyages. Pas des vacances en club ».

Et on enchaîne… « sinon, mes clients adooooooorent  ce joli petit hôtel de charme » (voix de pétasse) et on essaie de placer ce qu’Isa nous a négocié… si les clients veulent vraiment du club, on leur dit d’aller en face « où ils font ça très bien ».

En face, c’est aussi une agence Big-Boss Voyages, mais on ne le dit pas aux clients… Et en face, on vend le petit TO bleu-blanc-rouge qui ne crache pas sur la distribution classique. On ne propose jamais Marmara. Si le client insiste, on va lui expliquer ce qu’il y a chez Marmara, chez Look, chez FRAM et Plein Vent et à la fin, on lui sort général, on arrive à détourner la vente… 

Marmara veut tout faire sur le web ? Marmara veut divorcer de la distrib’ classique ? OK, assumez les gars ! Ce que je voudrais, c’est que les têtes pensantes des réseaux se décident à dire discrètement aux points de vente « arrêtez de vendre Marmara, parce que là, ils se foutent carrément de nous ». Bien sûr, ils ne peuvent pas le faire officiellement parce que les contrats de référencement sont signés et qu’ils ne peuvent pas être dénoncés n’importe comment mais franchement… si un message officieux passe dans les points de vente, on a tout à y gagner : des surcommissions sur l’augmentation de notre chiffre chez FRAM et Look par exemple…


En fait, grâce à Marmara, mon rêve est en train de se réaliser : les agents de voyage ne distribueront bientôt plus de brochure et deviendront des inventeurs  de voyages. Enfin, on va pouvoir se différencier les uns des autres. Il en va de notre survie.