lundi 30 janvier 2012

Léa ne fera rien pour aider Megavacances. Au contraire...


Depuis mai 2010 que je raconte ma life dans TourMaG et sur facebook (qui sont quand même les deux mamelles de l’information des agents de voyages), je m’attache à un truc : rester anonyme.


Oh, certes… j’ai déjeuné une fois avec Jean, notre rédac-chef préféré. Ça faisait un an qu’on s’échangeait des mails, qu’on chattait sur MSN, qu’on s’envoyait des SMS (oui… Jean a mon 06…) et il m’a convaincue de le rencontrer pour qu’on puisse discuter de vive voix… alors un week-end du printemps dernier où j’allais voir des copines à Aix, j’ai fait un saut à Marseille et Jean m’a invitée à déguster un poisson délicieux sur la corniche. J’en salive encore tellement il était bon. (le petit blanc qui l’accompagnait n’était pas mauvais non plus, mais c’est un détail…). Et puis cette vue sur la mer… pfff… je me demande parfois pourquoi j’habite Paris.


Habiter en Provence, c’est quand même un luxe que j’adorerais m’offrir. Les gens sont marrants, mille fois plus détendus qu’à Paris, ils sont bronzés toute l’année donc forcément plus beaux que nous qui avons une espèce de teint de navet…


La mer n’est pas loin, on peu aller skier en 3 heures de route, se balader tranquille…
L’un des problèmes de Marseille, c’est que les mecs ne sont quand même pas très classe : le look survêt-OM, la médaille de la Sainte Vierge dans les poils et l’haleine chargée à l’ail et au pastis, c’est pas trop mon genre. Déjà que je suis célibataire à Paris 11ème, ça serait sans doute pire à Marseille !


Mais la Provence, c’est beau ! Il y a en un qui a fait le grand saut. Je ne trahis sans doute pas un grand secret : Philippe Bertholet, le plus Belge de nos commerciaux préférés habite à côté d’Avignon. Tout les professionnels de la profession le savent.


Il faut que je vous avoue un truc… Philippe Bertholet est un copain. Quand j’étais un peu plus jeune (rien que d’écrire ça, je me sens vieille) et que je travaillais dans une usine à vendre des vacances de dernière minute dégriffées à pas cher, je travaillais beaucoup avec Best Tours. Un TO dont Philippe était le patron en France.


Best Tours affrétait un vol entre Paris et Phuket. Grâce à des contrats à l’année avec de gros hôtels, Phuket se vendait à prix béton. Certes, les prix d’appel étaient souvent sur des hôtels tout moisis mais y’avait aussi du quali’ pour ceux qui étaient prêts à payer un peu plus cher.


Et puis dans mon usine à vendre des vacances de dernière minute dégriffées à pas cher, on avait un bon deal avec Best Tours : outre un commissionnement à rendre fou n’importe quel acheteur, Best Tours nous accordait une exclu sur des petits hôtels mignons comme tout qu’on était tous seuls à proposer et que les clients avaient du mal à trouver sur le net. Bilan : vol XL à pas cher (rapport à l’engagement de Best Tours) + hôtel de charme + commission sexy = ventes en folie !


Quand je suis arrivée chez Big Boss Voyages, je suis tombée de haut quand j’essayais de vendre de la Thaïlande : je trouvais les tarifs cher, je n’avais plus les petites adresses dénichées par Best Tours en exclu pour mon ex-employeur de vacances de dernière minute dégriffées à pas cher, c’était devenu bien compliqué. Et Philippe, malgré nos bonnes relations, ne pouvait pas faire grand chose pour moi… la faute à ma « tête de réseau ».


Arrivée chez Big-Boss Voyages, trouver des solutions alternatives pour vendre la Thaïlande a été mon premier grand chantier : Isa m’a négocié des prix avec Cathay Pacific et Qatar Airways, j’ai harcelé ma réceptif adorée de questions sur les hôtels et je suis allée voir sur place. (oui, parfois, il faut se résoudre à aller sur le terrain, comme je le dis souvent « on fait pas des métiers faciles… »)


Du coup, j’arrive désormais à proposer « mes » trucs un peu exclu avec des séjours plage dans des hôtels dont je garde le secret et je les combine avec une découverte de Bangkok ou d’Hong-Kong. (du coup, le vol Paris/Phuket auquel je n’ai plus accès ne présente plus grand intérêt). Et la Thaïlande est l’un des grands succès de l’agence.


Et voilà que j’apprends aujourd’hui que Philippe revient avec son petit cartable et son délicieux accent belge dans nos agences : « Megavacances », ça vous dit quelque chose ? C’est une marque de cahiers de vacances qu’on avait quand on était petits pour « ne pas déconnecter complètement pendant les grandes vacances » : du coup, on faisait des exercices soit-disant ludiques pour ne pas retourner à l’école début septembre complètement décérébrés…


Megavacances, c’est aussi la nouvelle marque au nom cheapissime de Karavel (vous savez, la boite qui a entre autres Promovacances et Un Monde à 2).


Bref, en cette période où « le marché se contracte » (j’adore employer ce genre d’expression délicate qui évite de dire « comme c’est la cata’ en ce moment » ), ça doit aller moyen chez Karavel et il faut trouver de nouveaux débouchés pour écouler les stocks aériens et hôteliers. Donc, qu’est-ce qu’ils font ? Ils essaient de se positionner sur le réseau de distribution. Comme quoi, on sert encore à quelque chose…


Alors ces gens qui n’ont cesse de mettre la pression chez les fournisseurs en réclamant des 18% de commission plus incentive, qui payent quand ils ont le temps et qui imposent des conditions draconiennes aux fournisseurs se mettent au modèle B2B. A se demander comment (et à combien) ils vont nous commissionner.


Bref, la question qu’on doit se poser dans les agences tradi, c’est « qu’est-ce qu’on fait ? »
Doit-on céder aux sirènes de Megavacances et vendre les produits de cette nouvelle marque ? On en a parlé 5 minutes avec Big-Boss et Isa ce soir et notre réponse est « non ». Fermement, non !
Pas question de livrer en pâture à Karavel les coordonnées de nos clients (Megavacances va bien leur remettre des questionnaires de satisfaction pour les récupérer…) au risque de les perdre. On a blacklisté Jet Tours pour cette raison, on ne va pas ouvrir notre carnet d’adresses à Promovac via Megavacances…


Karavel doit bien savoir que pour conquérir la confiance des agences, Megavacances doit faire ses preuves. En ce sens, embaucher un mec du talent de Philippe Bertholet est le minimum !
Philippe, tu es adorable et je t’aime beaucoup mais je souhaite ardemment que Megavacances se plante. Je disais un jour « il y a trop de TOs ».


Dans un monde parfait, on ne devrait pas tous vendre la même chose. J’ai déjà écrit au moins 1000 fois que « le jour où je ne pourrai vendre que du Thomas Cook et du TUI, je changerai de métier ». Et bien je n’ai pas envie de changer de métier. Et si je ne veux pas proposer la même chose que les agences TUI et Thomas Cook, ça n’est pas pour vendre ce que mes clients trouveront sur les sites des usines à vendre des vacances de dernière minute dégriffées à pas cher.


Alors, toutes ensembles, mes sœurs, potassons, réfléchissons, construisons nous-mêmes les vacances personnalisés de nos clients adorés. C’est à ce prix qu’ils resteront dans nos petites agences.


Et si Megavacances se plante grâce au travail de sape quotidien des agences qui refuseront de vendre les produits de ce groupe qui tente chaque jour de nous piquer « nos » clients, je serai la première à faire un bisou magique à Philippe pour le consoler.



mardi 24 janvier 2012

Léa est bien trop jeune pour mourir

J’ai reçu plusieurs mails cette semaine, genre « alors Léa, t’as rien à dire sur la naufrage du Concordia ? ». Alors si… figurez-vous, j’ai un million de choses à dire. Ce truc m’a bouleversée. Mais en ce moment, je prépare mon déménagement et donc, je manque un peu de temps. (oui, pour moi, une nouvelle étape de ma vie commence, je vous raconterai ça dans un prochain post…)


Oui, j’ai été bouleversée par les images. Ces buildings flottants semblent pouvoir dominer le monde et puis, ils sont comme tout le monde… fragiles. Ça m’a un peu rappelé les twin towers de Manhattan un fameux 11 septembre. On voit ces trucs fiers, insurmontables, solides… et puis d’un coup. Badaboum.


Bon… aux dernières nouvelles (mardi 24 janvier à midi), il n’y aurait « que » 15 morts et 19 disparus. Sur les 4229 passagers et membres d’équipage embarqués, il n’y aurait donc « que » 1% de perte. Bien entendu, chaque perte humaine est inestimable.


Dans la « liste » des disparus, je trouve assez indécent qu’on distingue les passagers des membres d’équipage et qu’on les « classe » par nationalité. Comme si un passager français avait plus ou moins de valeur qu’un passager hongrois…


Lundi dernier, Libé publiait le témoignage d’un serveur sud-américain et titrait « Les héros, c’est nous : Colombiens, Honduriens, Chinois… Le serveur sud-américain racontait comment l’équipage, composé de gens de 20 nationalités, a sauvé, selon lui, au moins 500 personnes dans le naufrage du Costa Concordia... » Pendant que le commandant avait glissé dans une chaloupe (c’est ballot, ça… tiens…) contrairement au précepte bien connu du « le commandant est le dernier qui quitte le navire »


Bon, la où on est tous d’accord, c’est pour dire que le commandant de bord semble être une belle ordure. « Ouh la la, la bloggeuse déraille » vous dîtes-vous… Non ! Je reprends ce que dit la presse ! Il s’appelle Francesco Schettino, et même si chacun a le droit de bénéficier de la présomption d’innocence, reconnaissons à ce Monsieur le titre peu envié de « personne la plus détestée d’Italie ». C’est son titre officiel. Berlusconi doit peut-être regretté d’avoir quitté le pouvoir.


Francesco Schettino a tout du genre de mec a qui tout réussit… à qui rien ni personne ne pourra résister… bronzé, la chemise ouverte sur un poitrail velu (il ne manque plus que la médaille de la sainte vierge), on l’imagine très bien prendre le micro pour entonner « love boat » ou faire une blague graveleuse. Le côté vieux beau gominé sur le retour, sorte de crooner mitigé de Berlusconi me débecte un peu. Mais c’est un avis personnel… mais il me rappelle un peu un homme politique français qui aurait récemment « raté son rendez-vous avec les Français ». Le même regard qui déshabille. Mais je m’égare…


Il semblerait quand même (selon les premiers éléments de l’enquête) que le commandant ait demandé à son équipage de frôler d’un peu près les côtes de l’Adriatique pour les « saluer », contrairement aux procédures en place dans la compagnie.
Bon. La justice a été saisie et puis, il parait qu’on ne tire pas sur une ambulance.


Ce billet est destiné aux professionnels du tourisme, donc abordons cette catastrophe d’un point de vue professionnel. Reconnaissons à Georges Azouze et ses équipes leur grand professionnalisme, leur réactivité et leur dignité. (même si eux aussi, ont commencé à tirer à boulets rouges sur le commandant en question). Et espérons que les agents de voyages et surtout les clients ne fassent pas d’amalgame entre cette catastrophe unique et le nombre de bateaux de croisière qui circulent tous les jours sur tous les océans et mers du monde sans dommage.


Parce que depuis quelques années, entre les catastrophes dans les transports, les crises naturelles (genre tsunami, tremblement de terre ou inondations) et les événements politiques, c’est quand même bien compliqué.


La croisière semblait être le produit miracle : pas de risque de moyen de transport bloqué par une grève des pilotes, des contrôleurs ou des hôtesses… pas de bagage perdu (il suit le client…), pas de surbooking, pas de problème géopolitique (au pire, on reroute le bateau…), on peut vendre la croisière les yeux fermés ! et bien non, le produit miracle n’existe pas !


D’ailleurs, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais la presse est unanime : on va tous crever.
Je me faisais la réflexion jeudi dernier. Comme c’est « plutôt calme » en ce moment à l’agence, j’avais pris une journée de récup pour faire les soldes. Les rues étaient noires de monde. Les boutiques vomissaient de clientes qui portaient des sacs à chaque bras…


Moi, je n’ai rien acheté. J’ai eu un petit coup de déprime. Parce que même si les trois-quarts des boutiques devaient presque refuser du monde, les agences de voyages restaient inexorablement vides.


Voir ces agences de voyages vides me fait vraiment déprimer. Chez Big-Boss voyages, on met de la musique pour s’ôter cette pesante impression de silence. Chez nous, encore, on est nombreux… donc voir ces vendeurs alignés derrière le comptoir comme des mannequins donne l’impression que l’agence tourne… et puis le volume d’activité aux sociétés est assez soutenu, donc le téléphone sonne un peu…


Mais chez la plupart de mes confrères, je vois le plus souvent deux filles, parfois une seule (mais comment fait-elle pour survivre ?) dans des boutiques vides.
Je n’ai pas envie que les agences de voyages « de quartier » disparaissent comme les petites librairies et les disquaires indépendants ont disparu dans les années 80 et 90. Pourtant, je m’inquiète.


Les petites agences ferment les unes après les autres, les réseaux régionaux (moi, je n’arrive pas à appeler « mini réseaux » des trucs à 25 points de vente) ferment des boutiques (pardon… elles ne ferment pas : elles « rationalisent leur maillage », mais en gros, le résultat est le même...)


En ce moment, il semble que tout le monde flippe : dans le monde de la distribution, on s’observe… j’ai surtout l’impression qu’on fait tous la même chose : on essaie de fidéliser notre portefeuille clients, on tente par tous les moyens de se faire remarquer de ceux qui nous ignorent et… on sert les fesses.


On lutte contre les mutuelles qui vendent la même chose que nous (mais moins cher), on lutte contre les pure-players (chez Big-Boss Voyages, on a accès à la base de données d’Expedia… et on gagne quand même 11%...), on se bat contre les réceptifs qui vendent en direct… et là, on flippe de voir débarquer « google travel » sur nos plates-bandes.


Je n’ai pas du tout compris en quoi ça allait nous faire de la concurrence, mais on a survécu aux usines de vacances en promo dégriffées de dernière minute sur internet, aux call-centers puis aux sites web des compagnies aériennes en direct, à Trip Advisor et aux ventes privées… dans le combat du pot de terre contre le pot de terre, je reste encore optimiste. Et tant que je n’ai pas compris ce qu’allait être « Google travel », je peux encore dire « même pas peur… »


Mais quand même, dites moi… on va pas tous crever, hein ?


Parce que ce mercredi, on va savoir si runaworld fait la faillite ou si l’activité continue… Comment pourrait se casser la figure une si grosse agence de billetterie… filiale du Crédit agricole, au capital d’1,4 M€, qui a développé des solutions technologiques hors-pair, qui promet de SBT super-efficaces et des statistiques au service des entreprises (et de leurs politiques d’achat), des frais de gestion comprimés parce que « tout le boulot opérationnel est fait par les entreprises » ? Si une agence à l’apparence aussi solide peut faire faillite, comment on fait, nous, les petites agences de détail, pour s’en sortir ?


On travaille sur les marchés de niche ?
Le tour-operator ATTITUDE TRAVELS, l’un des très rares à proposer des voyages « gay » en France a aussi déposé son bilan le mois dernier. Pourtant, elle avait un bassin de clientèle super important : 5 à 7% de la population française » serait gay selon Max. (et 80% des contacts téléphoniques enregistrés dans son blackberry, mais ça n’a rien à voir). Et ben, faillite quand même… C’est expliqué là :
http://www.attitude-travels.com/


On se lance dans le package dynamique tout simple ? avec des marges faibles mais une techno infaillible qui permet de compresser les coûts au maximum ? C’était le modèle économique de neofly qui a pourtant fait faillite il y a quinze jours…




Et je ne parle même pas de cette agent de voyage de Chinon qui vendait des billets d’avion et qui « oubliait » de les émettre…


Bref, à ce rythme là, on devrait tous crever… et si il n’y a plus d’agence de voyages, je ne sais pas pour qui je vais écrire…


dimanche 1 janvier 2012